07/01/2010
Savoir(s) en rire (Hugues LETHIERRY)
Témoignages, humour involontaire
La guerre d'Algérie se terminait avec l’OAS et nos professeurs, d'un commun accord, refusaient qu'il en fût question, alors même que des bibliothèques flambaient en Algérie et que les attentats se multipliaient. Les événements se répètent parfois et, quoi qu'en ait dit Marx, ce n'est pas toujours sous forme de comédie (J'interprète à ma façon la célèbre phrase du 18 Brumaire). Le professeur d'histoire (dont je tairai le nom, arrivait régulièrement en retard car il enseignait également dans le privé. Comme nous avions un jour décidé de tous partir, nous eûmes droit (toute la classe!) à une exclusion temporaire et à un discours du proviseur expliquant que le lycée de Bergson et de Proust n'était pas «l'abbaye de Thélème» O tempora, o mores!
À cette époque, aucun professeur n'aurait écrit un plan air tableau noir.
En khâgne, au lycée Lakanal, professait un enseignant de philosophie, positiviste convaincu, dont personne n'écoutait les cours mais qui écrivait des ouvrages fort sérieux au demeurant sur «l'autorité du maître» (Gloire soit cependant rendue à Auguste Comte, (dont j'ai depuis visité la maison). Puis je passai en Sorbonne où je ne rencontrai malheureusement ni Piaget ni Merleau-Ponty. Je parle ailleurs de Jankélévitch et ne une répéterai donc pas ici. L'antique université ne représentait plus la même orthodoxie qu'autrefois (face à l'esprit de libre examen que défendait le collège de France) mais l'enseignement qu'on y donnait reposait sur le triptyque Platon-Descartes-Kant. (Je connus ensuite en Ecole Normale Piaget-Freud-Wallon). On avait certes droit à un détour par Plotin, à une once de moyen âge, un soupçon de Hegel... Bachelard passa un jour pour un clochard venant se chauffer au collège de France.
Je connus ensuite l'Université de Nanterre et, avec son profil aquilin, Henri Lefebvre dont la présence subjuguait étudiantes et étudiants. Dans un cours sur « l’aliénation » où il commentait un tract du Club Méditerranée. Monde de signes offerts à nos yeux étonnés! L'université passait, c'était notre illusion, du monde clos à l'univers infini... (À travers les bidonvilles de banlieue...)
Coopérant en Algérie, je remplaçai à Mascara une collègue qui avait commis le crime d'expliquer en classe, l'histoire du Petit Hans de Freud. Pauvre enfant qui ne sut jamais les victimes de son propre «cas»! Je connus pratiquement dans ce pays mes premières classes mixtes!
Avant les conseils de classe, des élèves compréhensifs nous offraient parfois, malgré nos rétractations, poulet ou bouteille de vin (du moins une fois!).
Lorsque je repris plus tard mes études à Nancy pour un DESS de Sciences de l'Education, nous provoquâmes un jour une intervention de Lapassade que l'Institution craignait à ses heures, comme le roi ses bouffons subtils. Se retrouver étudiant. provoque un renversement comique de situation. Mais l'université de Saint-Denis où je m'inscrivis pour une thèse était suffisamment différente de la Sorbonne pour que je n'aie pas l'impression de «recommencer» (comme naguère en 6ème) un cursus antérieur. D'autant que les Sciences de l'Education me faisaient découvrir les Philosophes sous un jour nouveau ; le monde n'avait pas changé de base mais mon regard sur lui! Y compris, plus irrespectueux, sur mes enseignants, mes collègues.
Puisse ce livre aider le lecteur et l'auteur à prendre conscience de leur propre clown pour ne plus l'être mais le jouer avec la «maitrise» des metteurs en scène!
Savoir(s) en rire 3
Rire à l'école ?
(Expériences tout terrain)
Pages 121-122
10:01 Publié dans 6-CONFRONTATION d'idées | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook
Les commentaires sont fermés.