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24/01/2009

Maxime PICARD et les nouveaux Coopérants

 

Les vacances se déroulèrent au mieux. Oubliant tous les risques encourus pendant les «événements» et sachant qu'ils ne se renouvelleraient pas, nous profitâmes sans contrainte de ces mois de détente.

 

Quand nous repartîmes, nos familles éprouvèrent moins d'appréhension que lors des années précédentes.

 

La toute nouvelle république algérienne fit bientôt appel aux pays amis pour l'aider dans son développement. C'est ainsi qu'arrivèrent des coopérants animés des meilleures intentions. Les Français n'étaient pas les derniers à apporter leur contribution, venant renforcer l'effectif de ceux qui avaient choisi de rester après l'indépendance. Pour mener à bien l'arabisation en milieu scolaire, les pays du Maghreb apportèrent leur aide ainsi que l'Egypte et la Palestine. L’Education ne fut pas la seule branche à profiter de cette collaboration. Dans le domaine de la Santé, les autorités algériennes firent appel à des pays de l'Europe de l'Est, notamment la Russie et la Bulgarie.

 

A Mékla vint s'installer un médecin bulgare qui fut vite reconnu comme un praticien compétent et dévoué, recevant à son cabinet, se déplaçant à la demande, ouvrant de petits dispensaires dans les bleds reculés, formant des infirmiers – tout cela bénévolement, sa seule rémunération provenant du traitement que lui allouait son pays d'origine

 

Il se présenta un jour à mon bureau, de façon spontanée et très sympathique. Se rendant compte de l'importance de la population scolaire et du suivi médical déficient, il me proposa d'organiser des visites de contrôle sanitaire et d'envisager des séances de vaccination DTTAB destinées aux élèves du primaire. J'acceptais, naturellement, sachant que l'inspection académique verrait l'initiative d'un très bon œil.

 

L'organisation de cette vaccination, qui concernait plus de 500 enfants, posait quelques petits problèmes –qui ne demandaient qu'à être résolus– Chaque instituteur dicta à ses élèves un formulaire les autorisant à se faire vacciner, qui devait être signé par les parents. Il n'y eut aucun refus. Les trois injections qui devaient être espacées l'une de l'autre d'une semaine se pratiquèrent dans la grande cour de l'école. Les rudiments de secourisme que nous avions acquis à l'école normale, qui comprenaient l'initiation aux piqûres intramusculaires, nous furent alors d'un précieux secours. Nous fûmes trois enseignants à mettre à dispositions nos talents dans ce domaine. Sous le contrôle et avec la collaboration du médecin et d'un infirmier, nous progressâmes dans l'art de doser la quantité de vaccin, de flamber les aiguilles, de piquer sans hésitation. Dès la deuxième séance, nos petits patients pouvaient choisir leur «piqueur» et l'on pouvait entendre : «Monsieur Gay, il ne fait pas mal», «Moi, je préfère le docteur», «Moi, non ! C’est Monsieur Pons!». D'autres allaient vers l'infirmier ou Monsieur Picard. Toujours est-il que l'opération fut menée à bien.

 

La collaboration avec notre médecin n'en resta pas là. Il fut toujours présent quand nous eûmes besoin de lui. Il ne tarda pas à devenir un véritable ami et nous pûmes apprécier son dévouement, son humanisme, sa culture. Il s'intégra si bien à notre groupe qu'il épousa une jeune célibataire de l'école de filles. Il avait pour habitude de nous appeler «bardjanak» (terme bulgare dont je ne garantis pas l'orthographe) et que nous traduisions par «ami».

Nous avons gardé des relations d'amitié avec le couple, installé, depuis, dans la région parisienne. Malheureusement, nous dûmes assister récemment, au «Père La Chaise» à la crémation de notre «bardjanak», victime d'une crise cardiaque.

 

Les années qui suivirent, mes collègues et moi avons participé de notre mieux à l’effort de construction de cette Algérie nouvelle. Notre statut de coopérant nous interdisait toute participation à la vie politique du pays d'accueil ; nous consacrant uniquement à notre travail, nous ne pouvions pas prendre parti devant certaines dispositions qui nous paraissaient discutables. C’est ainsi que nous connûmes l'arabisation de l'enseignement. Il paraît normal et même souhaitable qu'un pays indépendant tienne à enseigner à ses enfants dans la langue maternelle. En Kabylie, le problème est particulier : d'origine berbère, les Kabyles restent attachés à leur tamazight. Toujours est-il que cette arabisation a été lancée de façon un peu hâtive, sans que soient formés un nombre suffisant d’enseignants. On fit appel au début, aux cheikhs des mosquées qui, malgré leur bonne volonté, ne surent qu'appliquer les méthodes des écoles coraniques. Dès la seconde année, l'éducation religieuse était inscrite dans les programmes, mettant à mal la laïcité à laquelle sont attachés les instituteurs.

 

Les activités syndicales n'étaient pas, elles non plus, permises aux étrangers. Le Syndicat national des instituteurs avait résolu la question en créant une association professionnelle : l’A.P.I.F.A. *  J'acceptai d'être le secrétaire de l'association, pour la Kabylie. La collaboration de Jean Pons (qui devait, par la suite, me succéder) me fut précieuse dans l'accomplissement de cette fonction.

 

Sur le plan scolaire, les résultats que nous obtenions étaient encourageants, et satisfaisant le pourcentage de réussite aux différents examens et concours : certificat d'études, entrée en 6e, C.A.P. professionnels. Le lycée Amirouche de Tizi-Ouzou accueillait nos élèves à partir de la 6e, à condition qu'ils soient internes. Jugeant préférable que les enfants de Djemâa puissent rester quelques années de plus au pays, je demandai et obtins la création d'un C.E.G. Il fallut malheureusement enlaidir la grande cour par l'installation de deux «préfabriqués».

 

Quant à notre internat, il fonctionnait correctement mais, faute de place, fut limité à 30 élèves. Ma femme obtint, sous contrat local, l'emploi de secrétaire, je réussis à faire détacher un instructeur en qualité d'intendant et deux surveillants furent nommés ainsi qu'un second agent de service. Notre C.C.E.P., devenu C.E.T., ne demandait qu'à s’agrandir. Je proposai donc la construction de nouveaux locaux, sur un terrain communal. Bien soutenu par l'inspecteur de l'enseignement technique, le projet fut assez rapidement pris en compte et j'eus la satisfaction de voir commencer les travaux.

 

 

* Association professionnelle des instituteurs français en Algérie

 

Extrait de son livre "Chez moi en Kabylie"

27/12/2008

Convention signée Jean DE BROGLIE et Abdelaziz BOUTEFLIKA

Nous autres, Coopérants, de quel régime dépendions-nous ?

Nous ne nous posions guère la question …


J’ai retrouvé le texte de la CONVENTION signée entre L’ALGÉRIE et LA FRANCE en 1966.

Voici les articles du Décret n° 66-313 du 14 octobre 1966 relatifs au Personnel de l’Enseignement.

Cette convention avait été signée à Paris le 6 (ou le 8) avril 1966 par Jean DE BROGLIE et Abdelaziz BOUTEFLIKA !

 

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06/12/2008

Chantal Péran, assistante sociale après l’Algérie

Chantal Péran, assistante sociale, et Jean-Jacques Parmentier, enseignant, ont fêté leur départ en retraite, jeudi, au collège Charles-Langlais de Pontivy.

 

Tout le personnel du collège était réuni pour honorer les heureux retraités, ainsi que leurs collègues appelés à d'autres fonctions et les (très) jeunes nouveaux arrivants.

 

Chantal Péran est également assistante sociale au collège Romain Rolland et au lycée du Blavet.

 

 

Chantal Péran se souvient très bien de l'année « 1968, le premier mai, je terminais ma première année à l'école d'assistante sociale, à Alençon en haute Normandie. Avant de partir à Saint-Lô et de passer le concours d'assistante sociale en 1972. J'ai connu mon mari, là-bas. Je l'ai accompagné en coopération, en Algérie, en 1970 ».

 

Sur la région, Chantal précise son parcours : « Nous sommes allés en Bretagne, la région d'origine de mon mari, en 1979. Ayant eu trois enfants, j'ai été dix ans en disponibilité. En 1989, je commençais au lycée du Blavet. Après la manifestation des lycéens en 1991 et la création des fonds sociaux, je suis arrivée au lycée Joseph-Loth et à Charles Langlais. Soit 26 ans dans l'éducation nationale ».

 

Chantal Péran se prépare à une retraite active avec ses enfants et petits-enfants. Sportive, elle s'investit dans la gym et le chant.

 

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Source : OUEST-FRANCE

02/12/2008

Père Christophe LEBRETON, mort à Tibhirine

 

Né le 11 octobre 1950 à Blois (Loir-et-Cher), Christophe LEBRETON passa d’abord deux ans en Algérie à titre de coopérant de 1972 à 1974. C’est alors qu’il connut le monastère de Tibhirine. Étant entré au monastère de Tamié en Savoie en 1974, il arriva à Tibhirine le 23 avril 1976 jusqu’au 11 novembre 1977. Il est ensuite reparti au monastère de Tamié, et il est revenu à Tibhirine en 1987. Poète et mystique d’une grande sensibilité, il établit des liens d’amitié très profonds avec la population environnante.

 

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Vue de Tibhirine
Source : Site de l'ADA

 

17/11/2008

Gilbert BADIA, promoteur de l’allemand à Alger

Gilbert BADIA (1916-2004)

 

Notre collègue et ami Gilbert Badia, mort à l’automne 2004 à l’âge de 88 ans, nous laisse une œuvre immense de germaniste historien de l’Allemagne contemporaine.

 

Il était fils d’un maçon catalan venu chercher du travail dans le Midi de la France. Après une brillante scolarité au Lycée de Béziers, il avait commencé à l’Université de Montpellier des études d’allemand. Assistant de français à Spiekeroog (une des îles frisonnes !) puis à Hambourg, il avait découvert à vingt ans l’Allemagne hitlérienne. Il témoignera plus tard de cette expérience qui l’avait profondément marqué. Son parcours personnel est celui d’un homme engagé dans les combats de son époque. Il adhère en 1938 au Parti communiste après sa rencontre avec sa future femme, une jeune institutrice communiste, et obtient en 1939 l’Agrégation d’allemand. Durant l’occupation, Gilbert Badia s’engage dans une organisation de la Résistance appelée « TA », le Travail allemand, une section de la MOI (« Main d’Œuvre Immigrée ») chargée de recueillir des informations auprès des soldats ennemis, de les démoraliser et de les inciter à la désertion. Arrêté deux fois, en janvier 1941 et en septembre 1943, il réussit à s’évader, de la prison de La Santé d’abord, puis d’un camp en Haute-Vienne. A chaque fois, il reprend ses activités de résistant à Paris. A la Libération, il devient Secrétaire général du quotidien communiste Ce Soir, dirigé par Aragon. Évincé du journal en 1950, il réintègre l’Éducation nationale. Nommé au Lycée Charlemagne à Paris, il occupera ce poste jusqu’au début des années soixante.

 

C’est durant cette période qu’il écrit son Histoire de l’Allemagne contemporaine, parue en 1962 et rééditée de nombreuses fois. Plusieurs générations d’étudiants germanistes se nourriront de cet ouvrage, dont le second volume surtout, qui traite des Allemagnes après la guerre, porte indéniablement la marque de son époque et de l’engagement de son auteur. En 1987, Gilbert Badia en fera paraître, avec une équipe de germanistes, une édition entièrement refondue.

 

Malgré cet ouvrage important, bientôt suivi par des recherches sur le mouvement spartakiste, Gilbert Badia n’avait à cette époque guère de chances d’être recruté dans une université française, du fait de son engagement politique et de ses orientations de recherche. La civilisation allemande était encore fort peu représentée dans les études germaniques, essentiellement orientées, avant 1968, vers la littérature, la langue et la philologie, et marquées par un certain passéisme. Il s’ouvrira les portes de l’enseignement supérieur, en allant apporter son aide au développement universitaire de l’Algérie indépendante, et en fondant à l’Université d’Alger la section d’allemand qu’il dirigera jusqu’en 1966.

 

A son retour en France, c’est dans des universités récemment créées, ouvertes à des approches contemporaines et à des objets d’études nouveaux, qu’il trouvera accueil. En 1968, après deux années passées à l’Université de Nanterre, il choisit d’enseigner au Centre Universitaire expérimental de Vincennes qui vient de s’ouvrir, la future Université de Paris 8. Il y enseignera jusqu’à la fin de sa carrière, en 1985, exerçant notamment la fonction de vice-président du Conseil scientifique. Il siègera par ailleurs comme élu du SNESup au Conseil Supérieur des Universités (l’actuel CNU), puis au CNESER.

 

 

Un homme de conviction aussi, mais sachant écouter et se remettre en cause, quand il le fallait, sans se renier ni se plier au discours dominant.

 

 

Il fut, enfin, un remarquable traducteur dans des registres très variés : pièces de théâtre de Brecht, de Martin Walser, Heinar Kipphardt, Jura Soyfer, Volker Braun, poèmes de Brecht, textes théoriques de Marx, Clara Zetkin et Rosa Luxemburg. Responsable de l’édition française de L’idéologie allemande, il traduisit aussi plusieurs autres textes de Marx, et procéda à la révision de traductions antérieures, faisant ainsi le pont entre les premières générations des traducteurs de Marx et ceux d’aujourd’hui. Il fut également le co-éditeur, avec Jean Mortier, de douze volumes de la correspondance Marx-Engels aux Éditions sociales.

 

 

Gilbert Badia n’était pas un homme de pouvoir, mais de partage. C’était un défricheur dont la curiosité intellectuelle est restée intacte jusqu’à la fin. Sa disparition est une grande perte pour les études sur l’Allemagne de notre temps. C’est aussi une grande perte humaine pour beaucoup de ceux qui l’ont connu.

 

Hélène Roussel et Jean Mortier

jeudi 31 juillet 2008

 

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