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19/06/2010

L’amorce de la Coopération franco-algérienne (Maurice FLORY) 2

 

Au bout d’une période de trois années à compter de l’autodétermination, c’est-à-dire le 30 juin 1965, il sera possible de savoir combien de Français de statut civil de droit commun ont demandé à acquérir la nationalité algérienne par une demande d’inscription ou de confirmation de leur inscription sur les listes électorales. Il y a tout lieu de penser, à la lumière de l’évolution récente, que la colonie européenne d’Algérie diminuera encore sensiblement jusqu’à cette date, et que parmi ceux qui resteront la plupart demanderont à bénéficier de la convention d’établissement prévue dans la troisième partie de la déclaration des garanties.

Parmi les différentes déclarations qui constituent les grands axes des futures relations entre la France et l’Algérie, il en est d’ores et déjà qui paraissent compromises, d’autres dont la mise en œuvre reste à l’état d’ébauche, d’autres enfin qui paraissent avoir pris un bon départ.  La logique de la décolonisation veut qu’à côté de liens acceptés, voire désirés, il en soit de difficilement supportés car condamnés à brève échéance par les exigences de la souveraineté politique. C’est le cas en tout premier lieu pour le maintien, même provisoire, d’une armée étrangère. Le gouvernement français l’a compris dans la mesure où il mène à un rythme accéléré l’évacuation des forces françaises en Algérie et semble vouloir devancer les délais prévus qui douze mois après l’autodétermination prévoient la réduction des effectifs militaires français à 80000 ( ?) hommes. En revanche, des difficultés se sont manifestées au mois d’octobre à propos de l’installation de l’armée française au Rocher Noir dans les bâtiments administratifs qu’occupait l’Exécutif provisoire. Il était facile d’imaginer les réactions que devait entraîner en 1963 l’utilisation de la base d’In Ekker pour des expériences atomiques et la concession à bail de la base de Mers el Kebir pour 15 années risque de faire rapidement l’objet d’un nouveau contentieux. 

La coopération technique par la mise à la disposition de l’Algérie, dans la mesure des moyens disponibles, d’agents français ne s’amorce que lentement. La période de mars à octobre constitue une véritable cassure qui a privé l’Algérie de la continuité de la collaboration française dont le Maroc et la Tunisie ont pu bénéficier au moment de leur indépendance. Peu de Français d’Algérie ont accepté de reprendre sur place et sous l’autorité algérienne leurs fonctions administratives et techniques ; il a donc fallu faire appel à un apport frais de la métropole qui, à la fin de l’année 1962, restait extrêmement faible. Environ 18 000 Français servent actuellement en Algérie, mais le plus grand nombre relève de la branche la plus florissante de l’assistance technique : l’enseignement, qui dispose à lui seul d’environ 10 000 professeurs ou instituteurs au titre de la coopération technique et 3 000 au titre de l’office culturel.

Il semble que la coopération relative à la mise en valeur des richesses du sous-sol du Sahara se soit mise en place rapidement et conformément aux prévisions. Il paraît en aller de même sur le plan économique et financier, encore qu’il soit trop tôt pour en juger à la fin de 1962 ; c’est le 12 novembre seulement que s’est opérée la séparation des deux Trésors et que les nouveaux organismes financiers algériens ont commencé à s’installer.

Si prématurée que puisse être une description de la coopération technique franco-algérienne à quelques mois de l’indépendance et à plus forte raison un jugement de valeur, il apparaît cependant déjà que les accords d’Evian sont mal adaptés à une situation très différente de celle qu’avaient prévue les négociateurs. Dès le 9 novembre, le Président Ben Bella exprime en termes nuancés l’idée qu’il faut reconsidérer ces accords à la lumière des réalités nouvelles : « Les accords d’Evian ne doivent pas constituer une fin en soi. Ils ne doivent pas constituer un goulot d’étranglement pour notre développement. Les accords d’Evian ont été bénéfiques pour les deux pays, mais qu’il soit clair qu’ils sont perfectibles et qu’ils doivent être adaptés à la réalité. II faut qu’ils permettent de construire l’avenir de l’Algérie dans la justice sociale pour tous les Algériens de toutes origines. Il n’est pas question de bousculer les étapes, de rayer d’un trait de plume ce qui a été signé par le Gouvernement français et par notre gouvernement. II faut être sage mais convenir que les accords doivent être adaptés. »

 

Maurice FLORY 

CHRONIQUE DIPLOMATIQUE

 

Fin 1962

Pages 422-425

 

Algérie_Gouvernement-1962_H-Boumedienne+A-Ben-Bella+A-Bouteflika.jpg
Gouvernement-1962 dont H.Boumedienne, A-Ben-Bella et A-Bouteflika

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