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24/10/2009

LETTRE OUVERTE de Gilbert ARGELES

À Abdelkader DJEGHLOUL, animateur  du groupe des « intellectuels algériens nationaux »

Suite à un échange téléphonique  du 30/06 /2001

… Je pense que la situation algérienne, dans sa complexité, appelle des intellectuels algériens d'autres analyses et engagements que le seul soutien au pouvoir algérien et à ses appareils d'Etat. Je pense, dans le même temps, que les médias français jettent de l'huile sur le feu de façon irresponsable, en attisant les divisions au sein de ton pays, sur la base d'informations fausses ou biaisées, et qui ne sont pas dues à leur naïveté. Et je pense profondément que personne, de l'étranger, n'a le droit de s'immiscer dans vos affaires : c'est pourquoi mon aide se voulait sans arrière pensée et simplement amicale, ce qui ne m'empêchait pas d'exprimer, en homme libre, mes propres points de vue.

Je te rappelle enfin, que j'ai été, dès l'âge de 22 ans, un farouche opposant à la guerre d'Algérie, et que j'en ai payé le prix dans ma carrière professionnelle, que j'ai été sanctionné, puis emprisonné et « malmené » par le D.O.P. durant mon service militaire. Et que, depuis, j'ai profité de toutes les occasions pour témoigner contre les tortures durant la guerre, dans la presse, dans le film de Bertrand Tavernier, dans le livre de P. Rotman, de même que je viens de le faire sur la chaîne Odyssée (chaîne uniquement câblée hélas)

Je te rappelle que j'ai été, durant les deux ans sous l'uniforme en Kabylie, victime de vexations, de menaces et d'atteintes volontaires à ma santé, et que j'en subis encore aujourd'hui les conséquences.

Certes, le passé n'est jamais le garant du présent. Mais ce passé, qui m'a meurtri, je pensais le surmonter en m'étant porté volontaire pour travailler comme coopérant psychologue à Oran, durant les années 1970-74, période durant laquelle j'ai essayé de donner le meilleur de mes compétences au service des enfants inadaptés et dans la formation des personnels algériens les ayant en charge. J'avais fait le choix de m'immerger dans la société algérienne, et non pas dans les cercles de coopérants que je trouvais trop souvent insipides ou porteurs de thèses néo-colonialistes. Et que ce choix m'a valu d'être isolé, déjà critiqué de part et d'autre, et finalement incité à mettre fin à mon travail…

Je considère donc que tes propos sur de soi-disant « attaches » aux « services secrets » sont une insulte gratuite, sans fondement évidemment, qui portent atteinte définitivement à notre ancienne et longue amitié, mais sans que cela n'influe sur mon respect du peuple algérien ou mon admiration pour son courage.

Et que ces propos, de mon point de vue, jettent un doute évident sur la qualité de tes engagements actuels et de ton expression publique. Cela m'est dur de te le dire : j'ai toujours eu une autre conception de l'amitié et de la confiance réciproque entre deux êtres qui avaient eu le sentiment, jadis, d'être sur « la même longueur d'onde ».

Ressaisis-toi, Kader ! Tu as certainement en toi les compétences et les ressources pour sortir de ton schéma unique de pensée, pour mieux entendre les appels de nombre de tes concitoyens, pour mieux introduire ton pays à sa place réelle dans le « concert » des nations, tout en y faisant respecter son identité.

Pourra-t-on redevenir amis un jour prochain ?

 

Gilbert ARGELES

ROTMAN+TAVERNIER_La guerre sans nom.jpg

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