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24/03/2008

Jean-Claude Barreau, auteur de "Toute l'Histoire du Monde"

Qui sommes-nous ? C'est la question que se posait en 1957, en plein drame algérien, Jean-Claude Barreau, alors sous-lieutenant de l'armée française dans les Aurès. La bataille d'Alger avait commencé, et sur son carnet de bord, le jeune homme à la conscience troublée, écrivait: «Aujourd'hui, je commence un livre d'histoire».  

Le réflexe était celui d'un ancien élève de l'Ecole Coloniale, «c'était l'ENA avec l'esprit d'aventure en plus», formé avant Dien Bien Phu, à une époque où la France ne se payait pas de mots. Le jeune Barreau, en digne soldat de l'Empire, eut donc l'idée généreuse, pour comprendre son pays d'écrire une histoire du monde.

Ce serment des Aurès, il s'y est tenu plus de quarante ans. Le livre qui parait aujourd'hui, co-signé avec Guillaume Bigot, en est la longue sédimentation.  

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"Toute l'Histoire du Monde" est marqué des tourments de cette Algérie de la décolonisation, laboratoire français du «choc des civilisations», et cas d'école pour les guerres contemporaines, depuis le conflit israélo-palestinien jusqu'à l'occupation américaine en Irak. L'Algérie d'hier, mais aussi celle de la guerre civile des années 90. La prise d'otage d'un Airbus d'Air France par le GIA en 1994, programmé pour s'écraser sur la Tour Eiffel, n'a-t-elle pas été une répétition générale du 11 septembre et de sa terreur à grand spectacle offerte au monde dans le ciel new-yorkais par Al Qaïda ? Le martyre des moines de Thibhirine, n'a-t-il pas été le premier sacrifice de sang d'une guerre de religion globalisée, dans laquelle les grandes puissances sont prises au piège?

Face à l'Amérique en guerre contre le terrorisme islamique, Jean-Claude Barreau, qui fut Directeur de la Coopération à Alger sous Mitterrand, et conseiller de Charles Pasqua au ministère de l'Intérieur, entre 1993 et 1995, se souvient d'abord de la France, de son empire, et de ses valeurs oubliées. Cette perspective est courageuse, tant la mémoire coloniale française a été plutôt formée par la lecture des Damnés de la Terre de Frantz Fanon (réédité en 2002 aux éditions de La Découverte), qu'à celle du Rôle Social de l'Officier du Général Lyautey (réédité chez Bartillat en 2004).  

Il y faut du courage aussi, parce que le livre renoue dans la forme, avec une tradition d'histoire chronologique, tombée en disgrâce depuis Mai 68. La réforme des programmes de 1969, contre-signée par un Général de Gaulle qui avait perdu la main, a été, pour Barreau, un coup fatal à la mémoire collective française. «L'idée qu'il existe un «bien commun», héritage constant de l'Europe, était devenue ringarde», écrit-il.

Aussi, dans "Toute l'Histoire du Monde", Mai 68 fait-il date comme l'invasion des barbares en 410 : «Il y a une leçon à tirer de l'implosion de l'empire romain : quand une civilisation perd ses raisons d'exister, de combattre, d'avoir des enfants, de les éduquer, de leur transmettre, à eux ou aux immigrants, ses convictions et sa culture, elle peut s'écrouler comme un arbre mort, qui a encore belle apparence mais qu’une simple pichenette suffit à abattre.»

(extrait d’un article du Figaro Littéraire)

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